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Fiscalité

Politique fiscale canadienne : une approche fondée sur les principes s’impose

Dans son mémoire prébudgétaire, CPA Canada préconise une approche fondée sur les principes en matière de fiscalité, alors que l’approche actuelle du Canada s’est traduite par une complexification, une mise en œuvre déficiente et des consultations insuffisantes.

Selon John Oakey, vice-président, Fiscalité, à CPA Canada, on se souviendra de la saga de l’augmentation du taux d’inclusion des gains en capital comme d’un bon exemple d’une approche des politiques fiscales qui fait abstraction des principes.  

« Le gouvernement n’a tenu aucune consultation sur les changements proposés. Il s’est contenté de décréter un délai de mise en œuvre de dix semaines, accompagné de propositions législatives publiées huit semaines plus tard et d’une campagne de marketing qui a généré confusion et mésinformation. »   


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John Oakey mentionne aussi le cas des simples fiducies, exemptées à la dernière minute des exigences en matière de déclaration pour l’année d’imposition 2023. « Le gouvernement, avec raison,cherche à accroître la transparence au pays pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement d’activités terroristes. Mais le recours au régime fiscal pour imposer aux simples fiducies des obligations de déclaration élargies n’est sans doute pas le meilleur moyen de repérer ces acteurs malveillants. 

Vu le nombre exorbitant de politiques fiscales adoptées, les textes législatifs sont mal rédigés et ne contiennent pas suffisamment d’indications pour être adéquatement appliqués et administrés. »  

Le fiscaliste explique que l’objectif principal du régime canadien est de générer des revenus pour payer les dépenses financées par l’État. « Notre régime fédéral a pour objectif secondaire, ou complémentaire, de stimuler l’économie ou de redistribuer les richesses en favorisant des activités ou secteurs ciblés et en atténuant les inégalités de revenus. » 

Par ailleurs, il considère que le Régime d’accession à la propriété (RAP) est une politique bien établie et efficace, qui permet à des particuliers de faire des retraits dans leur régime enregistré d’épargne-retraite (REER), à concurrence d’une limite déterminée, pour acheter une première habitation admissible, lesquels seront non imposables s’ils sont remboursés sur 15 ans. 

Pourtant, lorsque la demande a surpassé l’offre, menant à l’actuelle crise du logement, l’État a d’abord choisi d’introduire le Compte d’épargne libre d’impôt pour l’achat d’une première propriété (CELIAPP), une toute nouvelle politique fiscale accompagnée de sa législation et de son administration, avant de modifier le RAP. « La mise en œuvre du CELIAPP, alors qu’il aurait suffi d’apporter quelques modifications au RAP pour accomplir essentiellement la même chose, est un exemple frappant d’une approche faisant fi des principes en matière de politiques fiscales. » 

Ryan Minor, directeur, Fiscalité, à CPA Canada, décrit le régime fiscal idéal comme étant juste, simple, transparent et prévisible. Le régime devrait aussi être neutre et éviter, dans la mesure du possible, toute distorsion dans la prise de décisions économiques, à moins qu’un motif politique flagrant l’impose.  

Le directeur convient que le régime fiscal fédéral a des points forts. Entre autres, il est ancré dans l’idée qu’un contribuable non constitué en société devrait payer à peu près les mêmes impôts qu’une société ayant gagné et distribué les mêmes revenus.  

Mais la législation fiscale a pris de l’ampleur et s’est complexifiée avec le temps, s’éloignant ainsi des idéaux d’un régime fiscal fondé sur des principes. La complexité découle du nombre de règles que les contribuables et leurs conseillers doivent prendre en considération, ainsi que de la clarté de celles-ci et de la fréquence à laquelle elles sont modifiées.  

Par exemple, les particuliers doivent maintenant tenir compte de deux taux d’inclusion des gains en capital. Les particuliers à revenu élevé doivent respecter non seulement les règles d’imposition de base, mais aussi les règles relatives à l’impôt minimum de remplacement. Les actionnaires de sociétés privées, eux, doivent suivre les règles de l’impôt sur le revenu fractionné pour déterminer le taux d’imposition (normal ou maximal) d’un dividende. Pour leur part, les sociétés privées sous contrôle canadien (SPCC) doivent considérer une série de règles dans le calcul des déductions accordées aux petites entreprises.  

Plus la conformité se complexifie, plus elle coûte cher aux particuliers et aux entreprises. À cause des coûts de conformité, il est aujourd’hui particulièrement difficile pour les Canadiens vulnérables et à faibles revenus d’avoir accès aux prestations liées aux déclarations de revenus ou versées dans le cadre du régime fiscal. 

Ryan Minor explique que CPA Canada plaide depuis longtemps pour une réforme complète du régime fiscal, qui permettrait d’exposer les comportements contre-productifs qu’encourage le régime actuel et de remettre en question et réévaluer des politiques et exemptions considérées comme intouchables depuis trop longtemps.  

Par exemple, les SPCC peuvent profiter d’encouragements fiscaux depuis plusieurs années, dont les déductions accordées aux petites entreprises et les crédits d’impôt bonifiés à l’investissement pour la recherche scientifique et le développement expérimental. Mais ces encouragements fiscaux dissuadent-ils les entreprises de prendre de l’expansion et de gagner en productivité? Autre exemple : l’exonération cumulative des gains en capital. Encourage-t-elle des comportements productifs sur le plan économique?  

Une approche des politiques fiscales fondée sur des principes bénéficierait grandement d’échanges continus avec des organisations comme CPA Canada. 

« Nous faisons partie du régime fiscal, déclare Ryan Minor. Le ministère des Finances crée les règles, l’Agence du revenu du Canada (ARC) les administre, et nous aidons les contribuables à s’y conformer. » Il ajoute que CPA Canada constitue de nombreux comités chargés d’étudier l’incidence des propositions législatives et de leur administration.  

John Oakey précise qu’il y a une bonne communication entre CPA Canada et l’ARC pour ce qui est de favoriser une mise en œuvre adéquate des législations en fournissant les meilleures indications possibles. Il souligne qu’en raison du grand nombre de dispositions réglementaires mises en place au cours des dernières années, cette tâche est de plus en plus difficile à accomplir.  

CPA Canada est respectée au ministère des Finances, mais une meilleure communication est nécessaire sur la scène politique pour soutenir l’adoption d’une approche des politiques fiscales fondée sur des principes.