Femmes et membres des groupes racisés : conseils d’expert pour mieux négocier

Dans un contexte de négociation, il est essentiel de comprendre le point de vue de l’autre partie. Cherchez à savoir quels sont ses objectifs et ses préjugés, et trouvez une façon de travailler ensemble pour arriver à une solution satisfaisante pour tous. (Getty Images/Blue Images)

Souvent, les gens qui n’ont pas à négocier tous les jours dans le cadre de leur travail n’arrivent pas à bien le faire. Et pour les femmes et les membres des groupes racisés, cette pratique peut être encore plus difficile. Pourquoi? « Les femmes semblent parfois négocier moins que les hommes, croyant qu’en s’engageant dans des pourparlers ardus, elles iraient à l’encontre de leur rôle socialement accepté, qui est de prendre soin d’autrui », avance Tanya Walker, avocate plaidante en droit commercial et fondatrice de Walker Law. « Les membres des groupes racisés, peut-être peu habitués à voir des gens qui leur ressemblent à certains niveaux, pourraient se contenter de moins que ce à quoi ils aspirent. »

Que vous commenciez votre carrière de CPA ou que vous souhaitiez, comme gestionnaire, gravir les échelons, vous pouvez surmonter ces obstacles. Mme Walker, professionnelle noire qui a fait de la négociation son gagne-pain, a quelques conseils pour vous aider à atteindre vos objectifs. Sachant que le thème de la Journée internationale des femmes 2021 est « Choose to Challenge », il n’y a pas de meilleur moment pour faire votre place, peu importe l’objet de la négociation.

Dans le contexte où les CPA sont plus en demande que jamais, vous aurez ainsi tous les outils pour arriver à vos fins, peu importe ce que vous convoitez.

1) RENSEIGNEZ-VOUS BIEN

Toute négociation doit s’appuyer sur une bonne recherche. « Plus vous en savez sur le sujet, moins l’accent sera mis sur le fait que vous êtes une femme ou un membre d’une minorité », résume Mme Walker.

Avant d’informer un client de ses tarifs, poursuit-elle, un avocat pourrait vérifier les taux en vigueur auprès de collègues qui offrent des services comparables, ou sur le Web, tenir compte de ses années d’expérience, etc. Les CPA peuvent faire les mêmes recherches; les membres ont d’ailleurs accès aux données des sondages sur la rémunération de CPA Canada. Sans oublier que les CPA sont plus en demande que jamais.

Si vous postulez un emploi, rassemblez le plus d’information possible sur le poste et l’entreprise, et déterminez à l’avance ce qui est le plus important pour vous. « Votre priorité ne sera pas toujours l’argent, précise Mme Walker. Vous pourriez vouloir consacrer plus de temps à une certaine tâche, avoir plus de jours de vacances ou obtenir de l’aide pour rembourser votre prêt étudiant. »

Tanya Walker, fondatrice de Walker Law (Photo de Cyril Cromwell)

2) ALLEZ AU-DEVANT DES DEMANDES

En négociant votre rémunération, mettez l’accent sur la valeur que vous apportez à votre organisation. Quand Tanya Walker s’adresse à des clients potentiels, elle mentionne toujours ses réalisations, pour qu’ils sachent que ses taux sont justifiés : « Je ne cherche pas simplement à parler d’argent, mais plutôt à attirer l’attention sur la valeur que nous offrons pour le tarif demandé. »

Il est aussi important de montrer que vous êtes un joueur d’équipe, prêt à vous surpasser. Mme Walker cite une collègue qui, dans le cadre de son évaluation de rendement l’an dernier, a préparé un document résumant son rôle, ce qu’elle considère faire très bien, les éléments qu’elle a améliorés et les aspects qu’elle peut perfectionner. « Dans son document, elle montrait aussi comment elle contribue à l’atteinte de nos objectifs en s’acquittant de tâches allant au-delà de ses responsabilités, comme la rédaction de demandes de subvention. Voyant le travail accompli et sa progression, nous lui avons offert une augmentation. »

3) ADAPTEZ VOS RÉACTIONS

Mme Walker, qui négocie presque toujours avec des hommes (95 % du temps), a l’habitude d’entendre des remarques qui, sans être explicitement axées sur le sexe et l’ethnie, peuvent révéler certains partis pris. Sa réponse varie selon la situation.

« Je me demande toujours si la personne a fait la remarque intentionnellement ou non. Par exemple, lors d’un interrogatoire préalable où j’étais enceinte de 8 mois, l’avocat devant moi a demandé si je faisais la difficile en raison de ma “condition particulière”. Comme la séance était enregistrée et que le juge pourrait lire le procès-verbal, j’ai tout de suite relevé ses propos déplacés. Mais habituellement, je parle à la personne en privé, car les gens ne réalisent pas toujours la gravité de leurs paroles. »

Notons que cette année, le thème de la Journée internationale des femmes est « Choose to Challenge », ce qui fait écho à la nécessité de nommer les préjugés axés sur le sexe et l’ethnie, qu’ils se manifestent par des remarques inappropriées ou d’une autre manière.

4) PENSEZ À L’AUTRE PARTIE

Dans toute négociation, il est essentiel de comprendre le point de vue de l’autre partie, explique Tanya Walker. « On doit toujours chercher à savoir quels sont ses objectifs et ses préjugés, et trouver une façon de travailler ensemble pour arriver à une solution satisfaisante pour tous. »

N’oubliez pas non plus que vos propres expériences teintent vos impressions. Quand elle a affaire à des gens qui ont l’âge de ses parents, Mme Walker sait qu’ils pourraient la considérer comme un enfant. « Mais ce ne sera pas nécessairement le cas. Il faut donc être prêt à toutes les possibilités. »

5) TENEZ-VOUS-EN AUX FAITS

Peu importe la situation, il faut toujours garder son calme, recommande Mme Walker. « Laisser vos émotions prendre le dessus pourrait altérer votre capacité de jugement. Évitez de vous sentir visé. Concentrez-vous sur les faits, et restez poli et respectueux. »

Tanya Walker se souvient d’un cas où elle contre-interrogeait un dirigeant d’entreprise fortuné. « Il s’est emporté parce que mes questions le faisaient mal paraître et ont nui à sa cause. Je lui ai rappelé que je faisais simplement mon travail et que je n’émettais aucun jugement à son égard. Il s’est vite calmé. »

6) N’ACCEPTEZ PAS UNE PROPOSITION TROP VITE

En situation d’embauche, les femmes et les membres des groupes racisés peuvent accepter des conditions inférieures à leurs attentes, pour éviter de se retrouver sans emploi. 

Mais attention de ne pas accepter une proposition trop vite, souligne Mme Walker. « Si un employeur vous fait une offre, c’est qu’il vous a choisi parmi tous les candidats qui ont postulé et les rares élus qui se sont rendus à l’entretien. Donc, même si vous aviez décidé de ne pas négocier, prenez le temps de vous dire que cette offre n’est pas une affaire de chance et que vous méritez le poste. »  

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